Soirée Lectures Partagées du 7 novembre 2025

Animation & Compte-rendu : Miguel Couralet et Michèle Stubbe-Robinet

Une soirée dense et conviviale, mêlant découvertes, retours d’auteurs et coups de cœur personnels. De nouvelles venues et des fidèles se sont retrouvés pour partager leur passion de la lecture et ouvrir, chacun à sa manière, de nouveaux horizons littéraires. Une rencontre qui a permis de naviguer entre les genres et les époques, de l’essai à la fiction, de la philosophie à la bande dessinée.

Michèle 
« Vivre », Robert Badinter, Flammarion
Ce livre Vivre réunit deux interviews inédites accordées par Badinter. Il nous permet d’apprécier encore plus l’homme, ses qualités morales et intellectuelles : intelligence, sincérité fierté, pugnacité, fraternité, solidarité, courage, la justice.
– le premier entretien a été enregistré dans le cadre de la collecte « Mémoires de la Shoah, initiée par la Fondation pour la mémoire de la Shoah et l’Ina (2006), où il convoque ses souvenirs d’enfance et d’adolescent, dont l’arrestation et la déportation de son père alors qu’il n’a que 14 ans.
-le second, dans le cadre de la collecte « Passé composé, figure du siècle » de l’Ina (2023), ici c’est l’homme de l’abolition qui livre son dernier entretien.
Des récits intimes poignants pleins de franchise, des témoignages précieux pour l’Histoire.

Michèle
« Libres et égaux… L’émancipation des Juifs 1789-1791 » Robert Badinter – Fayard
Un traité de 250 pages très bien documenté, offre une lecture concise et éclairante sur l’émancipation des Juifs. Badinter y dresse un état des lieux avant 1789, souligne les ambiguïtés du Siècle des Lumières face à l’antijudaïsme traditionnel, et rappelle combien les principes proclamés par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen restaient encore à conquérir pour les Juifs de France.
Michèle a insisté sur l’importance civique et morale de ce texte : un rappel salutaire que la fraternité et l’égalité ne se décrètent pas, elles s’acquièrent.
Recommandation de Michèle : Pour ceux qui ont lu le pamphlet d’Olivier Gloag Oublier Camus, il faut lire absolument Retrouver Camus de Faris Lounis et Christian Phéline (Le bord de l’eau). Admirable !

Olivier
« La joie de l’ennemi », Julien Delmaire (Grasset)
Lauréat du Prix du roman Fnac 2025, La joie de l’ennemi s’impose comme un western littéraire sombre, poétique et habité. Julien Delmaire y mêle tragédie intime et critique sociale dans une Amérique du Sud traversée par la ségrégation et les fantômes du racisme.
Olivier a souligné la beauté âpre du texte, sa tension narrative et la puissance de ses personnages. Jeffrey, brisé par les traitements psychiatriques imposés par ses parents racistes, et Seymour, son ami noir, composent un duo inoubliable où la fidélité se heurte à la folie et à la violence.
Cette œuvre, riche en symboles, interroge la rédemption et la part d’humanité dans un monde abîmé. Olivier y a trouvé une forme d’espérance dans la fragilité de l’amitié, et une réflexion sur la mémoire, la culpabilité et la survie.

Olivier
« Échos originels », Richard Rasa (Le Lac aux fées)
Un roman d’anticipation ambitieux, où science et histoire s’entrelacent. En 2049, une équipe d’historiens et d’archéologues mandatés par le CODE effectue un saut dans le temps : une exploration vertigineuse du passé pour interroger la nature de l’Histoire elle-même.
Olivier a mis en avant la richesse narrative du roman : les points de vue alternent entre plusieurs époques et personnages, créant un jeu de miroirs sur la mémoire, la connaissance et la transmission.
Au-delà du récit futuriste, le livre propose une méditation sur le rapport entre les civilisations et la trace qu’elles laissent. Pour Richard, c’est un texte stimulant qui marie plaisir de lecture et réflexion philosophique.

Christian
« Blanc », Sylvain Tesson (Gallimard)
Ce récit relate la traversée hivernale des Alpes, de Menton à Trieste, menée par Tesson et son compagnon de cordée Daniel du Lac entre 2018 et 2021. Une aventure physique et spirituelle.
Christian a retrouvé dans ce texte le goût de l’effort, la solitude des cimes et la beauté brute du monde. L’auteur, dans sa quête d’absolu, transforme chaque étape en méditation sur la fragilité humaine et la résistance intérieure.
Au-delà du voyage, Blanc est pour lui une recherche d’apaisement : une manière de se dépouiller de l’inessentiel, de retrouver le silence et la liberté.

Simone
« La douleur », André Richaud (Grasset)
Simone a captivé l’auditoire par une présentation originale (une prouesse !) et documentée de ce roman oublié, redécouvert grâce à Camus. Publié en 1930, La douleur fit scandale : à Althen-des-Paluds, une veuve de guerre, Thérèse Delombre, tombe amoureuse d’un prisonnier allemand, sous les yeux de son jeune fils.
Elle a souligné la modernité du style de Richaud et la puissance tragique du récit. Dans cette passion impossible, l’auteur explore la honte, la compassion et la solitude, révélant une humanité déchirée.
Simone a rappelé combien ce texte a marqué Camus, qui y puisa sa vocation d’écrivain : un roman qui relie la Provence profonde aux questionnements universels du cœur humain.

Béatrice
« La nuit au cœur », Nathacha Appanah (Gallimard)
Couronné par le Prix Fémina 2025, La nuit au cœur entrelace trois destins de femmes victimes de la violence conjugale. Appanah s’inspire d’expériences vécues : la sienne, celle de sa cousine, et celle d’une autre femme, tragiquement disparues.
Béatrice a salué la justesse du ton : une écriture sobre, presque chuchotée, qui transmet la douleur sans pathos.
Elle a vu dans ce roman une œuvre de résilience, où la sororité et la parole des femmes deviennent acte de vie. Une lecture essentielle pour comprendre ce que signifie reconstruire après l’effacement.

Danielle
« L’étrangère aux yeux bleus », Youri Rytkhéou (Actes Sud)
Une jeune ethnographe russe débarque en 1947 à Ouelen, au bord du détroit de Béring, pour vivre avec une tribu tchouktche d’éleveurs de rennes.
Danielle a loué la force poétique et la sincérité de ce roman d’amour pour un peuple disparu. Elle a aussi souligné la qualité exceptionnelle de la traduction, qui restitue la musicalité du texte original.
Ce livre, à la croisée de l’ethnographie et de la méditation spirituelle, interroge la mémoire, la passion et la perte. Danielle y voit un plaidoyer pour les derniers chamanistes et pour la sagesse des peuples premiers.

Catherine
« Nérona », Hélène Frappat
Catherine a évoqué une farce grinçante autour du thème des migrants : une écriture cinématographique, rythmée, presque visuelle.
Elle s’interroge sur la démarche de certains écrivains contemporains qui semblent vouloir rivaliser avec les réseaux sociaux par une langue déstructurée ou familière.
Sa présentation, vive et pleine d’humour, a ouvert un débat sur les mutations du style et sur la place de la littérature dans un monde saturé d’images.

Geneviève
« Penser en Chine », collectif dirigé par Anne Cheng (Gallimard)
Ce recueil d’essais réunit de grands penseurs autour du dialogue entre philosophie chinoise et pensée occidentale. Anne Cheng est la fille de François Cheng.
Geneviève a apprécié la profondeur et la diversité des approches : un panorama intellectuel exigeant, qui donne à voir la richesse d’une pensée encore trop méconnue.
Elle a toutefois regretté un certain jargon universitaire, qui rend parfois la lecture ardue, tout en soulignant la portée culturelle et politique de cet ouvrage stimulant.

Barbara
« Du thé pour les fantômes », Chris Vuklisevic (Gallimard)
Une petite merveille d’« urban fantasy » ancrée dans l’arrière-pays niçois : deux héroïnes, Félicité et Agonie, évoluent entre réel et surnaturel.
Barbara a été charmée par le souffle poétique du récit, son humour et sa tendresse.
Elle a souligné la façon dont Vuklisevic célèbre la Provence à travers un imaginaire fantastique lumineux, où le merveilleux dialogue avec la réalité.

Jacky
« Les éléments » (Air, Terre, Eau, Feu), John Boyne (Philippe Rey)
Couronné par le Prix Fémina étranger, ce roman-fresque entrelace quatre récits autour de la culpabilité et de l’innocence.
Jacky a admiré la construction subtile de l’ensemble, la force émotionnelle des personnages et la virtuosité de l’écriture.
Pour lui, John Boyne signe une méditation universelle sur la condition humaine : entre faute et rédemption, une œuvre à la fois morale et bouleversante.

Miguel
« Spinoza, à la recherche de la vérité et du bonheur », Philippe Amador (Dunod)
Sous la forme d’une bande dessinée claire et vivante, Philippe Amador retrace la vie et la pensée du philosophe qui est développée dans son “ Traité de la réforme de l’entendement”.
Spinoza est un auteur difficile mais tellement inspirant et qui peut-être si utile pour la conduite de nos vies.
Miguel a souligné combien cette BD qui suit quasiment mot à mot le traité rend accessibles les démonstrations du philosophe : une invitation à penser par soi-même, à chercher la vérité en soi pour conquérir la liberté intérieure.
Une deuxième BD raconte de même façon la grande œuvre de Spinoza : “ L’ éthique”.
Enfin Miguel a rappelé l’intérêt de lire la biographie romancée de Spinoza écrite par J R Dos Santos : « Spinoza : L’homme qui a tué Dieu » (Pocket). Un titre provocant et peu adapté mais un livre passionnant qu’il avait présenté lors d’une précédente soirée littéraire.

José
 « Une livre », Fabrice Gaignault, (Arléa)
Gaignault raconte comment un livre – Remorques de Roger Vercel – a aidé Primo Levi à survivre à l’enfer des camps : un hommage bouleversant à la lecture comme acte de vie.
José a été émue par cette réflexion sur le pouvoir salvateur des livres. Elle y voit la preuve que lire, c’est continuer à respirer quand tout semble perdu.

« La tournée », Maxime Rossi (L’Iconoclaste)
Avec La tournée, elle a salué le regard tendre et lucide de Maxime Rossi : le parcours d’un libraire devenu infirmier, plongé dans la réalité d’un monde rural en déclin mais toujours riche d’humanité.

Marlies
« Le voyage d’Octavio », Miguel Bonnefoy, (Payot & Rivages)
Le voyage d’un analphabète vénézuélien, qui part à la découverte de son passé et de son pays.
Marlies a souligné la beauté de la prose de Bonnefoy : sensuelle, colorée, pleine d’humour et de poésie.
Elle a vu dans ce conte initiatique une célébration du savoir, de la culture et de la dignité retrouvée : une traversée lumineuse où l’homme se réconcilie avec sa propre histoire.

Soirée Lectures Partagées du 3 octobre 2025

Animation & Compte-rendu : Michèle Stubbe-Robinet et Miguel Couralet

Choix éclectique de livres pour cette soirée : des nouveautés de la Rentrée littéraire, des premiers romans prometteurs, des auteurs reconnus, des ouvrages quelques peu oubliés remis en lumière.

Micaela : Olivier Guez – Mésopotamie (Grasset)

Micaela a insisté sur la place centrale de l’héroïne, figure courageuse, tenace et pleine de
qualités, qui traverse le récit comme un fil conducteur. Par ses observations et sa curiosité,
elle apporte des informations précieuses sur le territoire parcouru, pendant la Première guerre mondiale permettant même l’élaboration de cartes géographiques. Sa voix incarne la mémoire vivante d’un espace déchiré, mais encore riche d’humanité et de savoir.

À travers elle, Olivier Guez fait revivre une région bouleversée par les guerres, mais aussi
fondatrice de notre civilisation. Entre fresque politique et méditation poétique, il relie les
ruines du présent à la grandeur des mythes antiques. L’héroïne devie nt ainsi la passerelle entre passé et présent, entre la fragilité des peuples et la permanence de la culture. Une lecture pas toujours aisée mais dense qui permet de s’attacher à l’héroïne

Barbara : Bérengère Cournut – “De pierre et d’os” (Le Tripode)

Barbara, passionnée par cette lecture, a raconté comment le livre l’avait transportée dans le
quotidien des Inuits, au point de l’accompagner d’une musique de blizzard pour mieux en
ressentir l’ambiance. Le roman suit Uqsuralik, une jeune femme inuite qui, séparée de sa
famille après la rupture de la banquise, doit apprendre à survivre seule et à s’ouvrir à un
monde spirituel.

Ce récit d’initiation, un ethno roman, nourri de mythes et de traditions, déploie une vision
singulière d’un peuple en lien intime avec la nature. La prose poétique de Cournut restitue la beauté glacée des paysages et l’univers des esprits. On y découvre une culture qui, à travers chants, récits et rituels, donne une autre manière d’habiter le monde et de le raconter. Douze heures passées dans le Blizzard pour Barbara de la banquise mais réchauffée par cette histoire extraordinaire.

Catherine : Gregory Le Floch – “Peau d’ourse” (Seuil, Roman)

Catherine, avec enthousiasme, a présenté ce roman qu’elle verrait volontiers adapté au cinéma
tant ses descriptions sont puissantes et visuelles, avec beaucoup d’effets spéciaux. L’histoire
interroge la frontière entre normalité et anormalité, en suivant des personnages marqués par la
différence et leur rapport singulier à la nature.

Le texte, traversé par une écriture sensible, oscille entre réalisme et poésie. La nature y est
décrite comme un miroir des émotions humaines, parfois refuge, parfois menace. À travers ce
récit, Gregory Le Floch invite à s’interroger sur ce que nous appelons « normalité », et sur la
capacité de la littérature à faire surgir d’autres façons d’être au monde.

Olivier
1/ Carl Honoré – “Éloge de la lenteur” (Marabout)

Olivier a présenté ce livre avec pour éviter la répétition une ardeur communicative,
soulignant combien il l’avait marqué. L’essai propose une véritable révolution intérieure :
ralentir nos vies frénétiques, redonner du temps à la lecture, aux repas, à la marche, à l’amour.
Honoré défend une philosophie du temps retrouvé, loin des injonctions productivistes, qui
redonne une place à la qualité plutôt qu’à la vitesse.

Par des exemples concrets (éducation, travail, alimentation, loisirs), l’auteur montre que
ralentir ne signifie pas s’arrêter, mais vivre mieux. Le livre, accessible et documenté, ouvre
des pistes pratiques pour repenser notre quotidien. Olivier y a vu un appel urgent à réformer
nos rythmes de vie et à retrouver une existence plus humaine.

2/ Bruno Camby – “Éloge de la sieste” (Écologie urbaine)

Toujours Olivier qui s’est fait le défenseur de la sieste, présentée comme un art de vivre
bénéfique. Bruno Camby démontre que quelques minutes de sommeil dans la journée
permettent de gagner en énergie, en concentration et en équilibre de vie. Loin d’être une
paresse, la sieste est une manière d’écouter son corps et de le respecter.

Le livre propose un parcours ludique et informatif sur l’histoire de la sieste, ses pratiques
culturelles et ses bienfaits scientifiquement prouvés. Olivier a rappelé, avec humour et
conviction, qu’adopter ce petit rituel pouvait améliorer la qualité de nos journées et nous
rendre plus sereins.

Jacky : Jean Hatzfeld – “Une saison de machettes” (Points)

Jacky a frappé l’auditoire en lisant des passages terrifiants de ce récit. Le livre donne la parole
à d’anciens tueurs du génocide rwandais, de simples paysans devenus, en l’espace de
quelques semaines, des assassins de masse. Hatzfeld recueille leurs témoignages bruts, sans
filtre, plongeant le lecteur dans l’énigme du mal collectif. (Un parallèle aussi avec l’horreur
des crimes nazis).

Ce texte bouleversant interroge les ressorts de la violence et de l’obéissance. Comment
bascule-t-on de la vie ordinaire au massacre organisé ? Par sa sobriété, le livre laisse résonner
les voix des bourreaux et met le lecteur face à l’incompréhensible. Jacky a souligné combien
cette lecture, difficile, reste indispensable pour comprendre notre temps.

Michèle :
1/ Sylvie Le Bihan – “L’ami Louis” (Denoël)

Michèle, passionnée par la figure d’Albert Camus, a présenté ce roman biographique qui
revient sur Louis Guilloux, ami intime de l’écrivain. Le récit retrace leur rencontre, leur
amitié et leurs échanges, éclairant d’un jour nouveau la personnalité des de ux écrivains, leurs
œuvres  et leurs rapports aux autres.

Au-delà du portrait d’un homme, le livre met en lumière une époque et les liens entre
littérature et histoire. Sylvie Le Bihan ressuscite un monde disparu, celui des intellectuels, des
amitiés fidèles et des dialogues profonds. Pour Michèle, ce fut une red écouverte émouvante
de Camus à travers le regard d’un proche c’est aussi un hommage à l’émission Apostrophe
qui fut présentée par Bernard Pivot.

2/ Carnet vénitien – “Liliana Magrini” (Le Promeneur, Gallimard)

 Ce petit ouvrage, écrit en français par une amie intime de Guilloux, se présente comme une
promenade dans Venise, à la fois carnet intime et guide poétique. L’autrice y dépeint la ville
qu’elle cerne d’un crayon précis. Il faut le lire si on a de l’affection pour la cité des Doges. A
travers ses ruelles, ses canaux, ses palais et ses ombres. Les fragments composent une
mosaïque sensible et nostalgique, qui fait de Venise un lieu intemporel.

À travers anecdotes, descriptions et impressions, ce carnet évoque l’art, l’histoire et la magie
de la cité des Doges. On y ressent la lenteur des pas, la lumière changeante et le charme du
quotidien. Une invitation à redécouvrir Venise autrement, entre poésie et contemplation.

Delphine :

1/ Ouvrage c ollectif – “Le retour du roi Jibril” (L’Iconoclaste)

Delphine a apprécié ce recueil choral, qui mêle récits et dialogues dans les cités
contemporaines. Neuf auteurs racontent la vie foisonnante des quartiers populaires, avec
leurs rêves, leurs codes, leurs tensions et leur créativité. Chaque texte éclaire une facette de
cette réalité multiple avec poésie et imagination.

L’ensemble compose une polyphonie vibrante, parfois drôle, parfois grave, mais toujours
authentique. La littérature devient ici un miroir de la société urbaine, loin des clichés. Pour
Delphine, ce livre montre la richesse humaine et culturelle d’espaces souvent stigmatisés.

2/ Bernard Lahire – “Savoirs en péril ” (Seuil)

Professeure elle -même, Delphine a été sensible à ce plaidoyer en faveur du savoir comme
source de joie. Bernard Lahire s’inquiète de l’affaiblissement de l’école et de la perte de goût
pour la transmission. Il rappelle que les savoirs ne sont pas des poids , mais des ressources
pour comprendre et se libérer notamment de l’évaluation qui devient souvent perverse , faisant
perdre la joie d’apprendre.

À travers une analyse sociologique fine, il insiste sur l’importance de défendre une école
exigeante, ouverte et vivante. Le livre réaffirme que la culture et la connaissance sont des
biens communs à protéger. Delphine a trouvé ce texte salutaire et motiva nt, en résonance avec
son métier.

Armony : Alexandre Lacroix – “Premières volontés” (Pocket)

Armony a impressionné par une première présentation magistrale en sept minutes, captivant
l’auditoire. Ce roman met en scène un personnage aux prises avec ses choix de vie, ses
héritages et ses contradictions. À travers son parcours, l’auteur explore la l iberté, la
responsabilité et le sens de l’existence.

L’écriture d’Alexandre Lacroix, à la fois philosophique et sensible, invite le lecteur à se
confronter à ses propres volontés. Entre réflexion et émotion, le récit interroge ce qui fonde
une vie digne et assumée. Armony a su rendre compte avec brio de cett e profondeur.

Une autre Michèle :

1/ Léonor de Récondo – “Marcher dans tes pas” (L’Iconoclaste)

Michèle (2) a été marquée par ce roman qui croise histoire intime et mémoire collective. Le
livre raconte l’exil, la guerre et la quête d’identité d’une femme espagnole qui cherche à
retrouver ses racines et à comprendre son passé.

La prose délicate de Léonor de Récondo donne chair à une mémoire douloureuse, tout en
célébrant la force de la transmission. C’est un récit de filiation et de survie, où se mêlent
douleur et espoir. Pour Michèle, ce texte résonne comme un témoignage univer sel sur la
mémoire des peuples déplacés.

2/ Agnès Desarthe – “L’oreille absolue” (L’Olivier)

Ce roman explore le monde de la musique à travers une héroïne dotée d’une oreille absolue.
Sa perception singulière des sons structure son rapport au monde, à la création et aux autres.
Agnès Desarthe déploie un style sensible qui fait entendre au lecteur l’univers musical.
Le livre devient aussi une réflexion sur l’art et sur la difficulté de vivre avec une différence.
Entre virtuosité et fragilité, le personnage principal illustre la tension entre don exceptionnel
et solitude intérieure.

Miguel : Alain -Fournier – “Le Grand Meaulnes” (Livre de poche)

Miguel a relu ce roman mythique, qui l’avait tant marqué adolescent. L’histoire suit Augustin
Meaulnes et son ami François Seurel, fils du directeur d’école, narrateur du récit. Leur vie
bascule lorsque Meaulnes découvre par hasard un mystérieux domaine et rencontre Yvonne de
Galais, incarnation d’un amour absolu. Ce roman raconte l’élan de la jeunesse, la force des
promesses et la quête d’un idéal insaisissable.

Mais Le Grand Meaulnes n’est pas seulement une aventure sentimentale : c’est aussi un
tableau de la France d’avant 1913, avec ses villages, son école, ses traditions et son mode de  
vie. Le style poétique et mélancolique d’Alain Fournier capte l’essence d’une époque et d’une
adolescence, entre enchantement et désillusion. Pour Miguel, ce livre reste un repère, à la fois
différent aujourd’hui mais toujours fondateur.

Marlies

1/ Luis Sepúlveda – “Histoire d’un escargot qui découvrit l’importance de la lenteur” (Suites)

Marlies a raconté avec humour cette fable animalière. Le livre suit une famille d’escargots qui
cherche à comprendre pourquoi ils sont lents. À travers leur quête, Sepúlveda livre une
réflexion poétique sur le temps, la patience et la différence.
C’est une parabole accessible à tous, qui invite à valoriser la lenteur comme une richesse.
Marlies a su transmettre la tendresse et l’amusement que ce petit conte a suscités au sein du
groupe.

2/ Laurent Vidal – “Les hommes lents” (Champs Flammarion)

Cet essai propose une réflexion originale sur la lenteur comme dimension de l’histoire
humaine. Laurent Vidal montre que les « hommes lents » ont toujours existé : pèlerins,
colporteurs, marins… et qu’ils portent une autre manière d’habiter le temps.
En croisant anthropologie, histoire et sociologie, l’auteur plaide pour une réhabilitation de la
lenteur comme valeur sociale et politique. Le livre rejoint ainsi, par un autre chemin, les
réflexions contemporaines sur nos rythmes de vie.

Le choix de notre libraire José

 1/ Maïa Thiriet – “Sans Eden” (Emmanuelle Collas)

José a présenté ce roman comme un thriller haletant. Le récit plonge le lecteur dans une
intrigue sombre, où se croisent violence, secrets et manipulations. L’écriture nerveuse
maintient une tension continue, portée par des personnages ambigus.
Au-delà de l’intrigue policière, le livre explore la fragilité humaine et la difficulté de se
défaire des traumas. José a souligné l’efficacité du récit et son intensité dramatique.


2/ Anouar Benmalek – “Irina, un opéra russe” (Emmanuelle Collas)

Ce roman captivant joue avec les boucles du temps et les destins croisés. Anouar Benmalek
mêle histoire et fiction, drame intime et fresque collective. Le récit, ample et foisonnant, fait
voyager le lecteur dans une Russie tourmentée.
À travers le personnage d’Irina, l’auteur interroge la mémoire, l’amour et la fatalité. La
structure narrative, proche de l’opéra, alterne intensité dramatique et moments lyriques. Un
texte ambitieux et envoûtant.

Octobre

Le deuil est difficile, chacun le sait, surtout quand il n’est pas absolument certain, bien qu’il soit acquis. Difficile. Mais, encore une fois : la vie, la vie d’abord. Je ne crois pas qu’il faille perdre le souvenir – je ne pense pas qu’on le puisse, on ne saurait le faire – et je ne crois pas que l’on doive vivre pour le souvenir et dans le souvenir des morts. Honorer les morts, s’en souvenir et vivre. Je crois que c’est ça, le véritable hommage à leur rendre. De préférence en essayant d’être fidèle à ce qu’ils pensaient mais surtout : vivre.

Vivre, Robert Badinter- Flammarion

Photos : Olivier Gazzano – PhotosGz.fr

Un livre, un auteur : Le village de l’allemand ou le journal des frères Schiller – Boualem Sansal

Animation – Compte rendu : Miguel Couralet et Michèle Robinet.

(A travers ce roman qui a obtenu de nombreux prix, nous avons souhaité dédier cette soirée à Boualem Sansal, emprisonné à Alger depuis 11 mois, pour ses prises de position contre le pouvoir algérien et témoigner ainsi de notre solidarité pour cet auteur de renom).

Quelle formidable réunion autour de ce livre ! Les participants avaient tous lu préalablement le roman et ont pu échanger librement, vivement et de bon cœur sur tous les aspects de l’œuvre.

Une œuvre forte, émouvante, parfois inquiétante, avec des moments d’humour mais aussi qui génère beaucoup d’inquiétude sur l’évolution des situations. Une œuvre majeure pour comprendre notre temps.

Avant de commencer, la lecture a été faite de passages d’une lettre de Boualem Sansal écrite en août 2025 où il expose son état d’esprit alors qu’il est toujours emprisonné dans les geôles algéroises.

Dans ce roman polyphonique qui date de 2008, l’écrivain nous plonge dans l’histoire de deux frères, Rachel et Malrich, fils d’un ancien officier allemand, Hans Schiller, ingénieur en génie chimiste de formation, qui avait œuvré dans les principaux camps de concentration pendant la Seconde Guerre mondiale.

Après la défaite, il a fui l’Allemagne et après un long périple s’est installé en Algérie. Il est devenu un temps instructeur militaire du FLN, puis s’est réfugié dans un petit village où il a mené une vie discrète cachant son passé de nazi, fondant une famille, se convertissant à l’Islam jusqu’au jour où, avec son épouse, il est massacré par le GIA, comme la majorité des habitants (Le massacre du village est un fait historique).

Ses deux enfants avaient été envoyés très jeunes en France pour être élevés par un couple d’amis immigrés.

Rachel, l’aîné des deux enfants, voulant honorer la mémoire de ses parents revient le premier au village et découvre l’identité cachée de leur père. Cette révélation le plonge dans une quête sans issue : il investigue sur les crimes nazis, voyage jusqu’aux camps où son père a sévi et dans les pays où il a transité pour fuir la sanction des alliés. Rachel consigne les 18 mois de son enquête méticuleuse dans un journal destiné à son frère. On visite avec lui les camps de concentration, rencontre les anciens compagnons de son père, on prend la mesure de ce que furent ces années d’abomination. Rachel accablé par l’horreur et incapable de porter le fardeau de savoir que son père avait été un tortionnaire et un criminel finit par se suicider.

 Le récit se poursuit avec la voix de Malrich. Adolescent de cité, moins instruit que son frère, il hérite donc du journal et découvre toute la vérité. Contrairement à Rachel, il s’efforce de donner sens à ce terrible héritage. À travers son regard se dessine une foule de personnages : ses copains de la cité, ballottés entre débrouille, violence et islamisme, les imams, figures d’autorité inquiétantes, le commissaire de police présent dans la cité interlocuteur sévère mais lucide, mais aussi les habitants du village algérien Aïn Deb.

Malrich cherche, à sa manière, une issue qui ne soit pas la haine ni le fanatisme.

En alternant des chapitres rédigés par Rachel avec ceux rédigés par Malrich, Sansal confronte la barbarie nazie, la tragédie de la guerre civile algérienne et la montée de l’islamisme en France.

 Le roman, d’une puissance exceptionnelle, avec son style incisif questionne la mémoire, la culpabilité et la responsabilité. Il évoque la question de la transmission entre les générations. Il offre une réflexion sur la possibilité de résister aux idéologies meurtrières. La référence a été faite à Albert Camus à propos de la posture des humains devant l’absurde.

Dans cette soirée de partage, sur ces thèmes si lourds et si graves, chacun a contribué à faire des distinctions, à poser les alternatives, à comprendre les enjeux, à repérer les impasses et à tracer quelques pistes d’espoir.

On retiendra aussi que la partie du récit de Malrich qui évoque la bande de copains de la cité est d’un humour et d’une justesse formidables.

Vraiment nous vous conseillons de lire cette œuvre !

Venez nous rejoindre dans ces soirées. C’est ouvert à tous et totalement gratuit !

Visitez les sites internet de la librairie et de l’association Partages Culturels en Provence.

Soirée lectures du 5 septembre 2025

Animation et  compte rendu :  Miguel Couralet et   Michèle Robinet.

Nous étions nombreux pour cette reprise, avec de nouvelles venues intéressées de voir comment se déroule le club littéraire. Elles ont dit qu’elles reviendraient…

Ceci permet de rappeler que l’accès est libre, gratuit, on vient quand on veut !

1/ CLAUDE :  Celui qui revient , Kang Han, Poche .

Claude a voulu découvrir Kang Han , prix Nobel qu’il ne connaissait pas. Il a aimé les descriptions dans le livre tour à tour crues et très poétiques. Il a découvert des faits historiques. Une belle découverte pour lui.

Han Kang, autrice coréenne déjà reconnue pour sa puissance narrative, signe avec « Celui qui revient » un roman profondément ancré dans l’histoire de son pays. Le récit s’inspire d’un massacre survenu en Corée du Sud pendant la guerre de Corée, lorsque des populations civiles furent massacrées sous prétexte de collaboration avec l’ennemi. Le narrateur, des années plus tard, revient dans la région de son enfance et se confronte à la mémoire collective et au silence pesant des survivants. Ce retour sur les lieux de la tragédie devient un chemin de douleur et de lucidité.

À travers une écriture à la fois poétique et implacable, Han Kang met en lumière les traumatismes d’un peuple encore hanté par ses blessures. Le roman explore le poids de la mémoire enfouie, la culpabilité des témoins et la difficulté de transmettre l’indicible aux générations suivantes. Le lecteur est immergé dans une atmosphère de deuil et de quête de vérité, mais aussi d’espérance fragile, comme si, au-delà de l’horreur, une réconciliation demeurait possible.

2/ DELPHINE : Mai 67, Thomas Cantaloube, Série noire Gallimard.   

C’est le 3eme livre que lit Delphine de la trilogie historique/policière après  Requiem pour une république et  Frakas

Avec « Mai 67 », Thomas Cantaloube ressuscite une page sombre et trop méconnue de l’histoire française : les émeutes de Guadeloupe réprimées dans le sang. À travers une fiction solidement documentée, il retrace l’atmosphère de Pointe-à-Pitre au moment où la colère populaire explose face aux injustices coloniales et sociales. Ses personnages évoluent dans un climat de peur et de tension extrême, confrontés à la brutalité policière et au silence imposé par les autorités.

L’auteur transforme ce drame historique en polar politique haletant. Il offre une fresque où s’entremêlent lutte pour la dignité, mémoire refoulée et enquête romanesque. Le lecteur découvre, à travers ces pages, une histoire volontairement mise de côté et se laisse emporter par une narration tendue, qui éclaire le présent à la lumière du passé.

Delphine a aimé le livre, bien construit, bien rythmé où les éléments historiques s’intègrent bien au roman.

3/ EVELYNE : Chagrin d’un chant inachevé, François -Henri Désérable. Gallimard

Evelyne a beaucoup aimé ce livre au récit bien tourné, vivant, plein d’humour et d’anecdotes.

Au départ du récit, il y a le deuil : la disparition d’un ami proche, qui laisse derrière lui un silence douloureux et une absence impossible à combler. Pour tenter de donner un sens à cette perte, le narrateur entreprend un voyage en Amérique latine, guidé par le souvenir d’une passion commune : l’histoire et la légende du Che Guevara. De Mexico à La Havane, des forêts boliviennes aux routes poussiéreuses du continent, chaque étape devient une manière d’interroger à la fois l’amitié perdue et le destin brisé d’un révolutionnaire.

Ce roman se lit comme un double chant : celui de l’intime, où la mémoire d’un ami défunt appelle des mots de fidélité et de consolation, et celui de l’Histoire, où la figure du Che, héros inachevé, résonne comme un miroir des révoltes et des désillusions d’hier et d’aujourd’hui. Désérable, avec son style élégant et vibrant, transforme la douleur en une quête littéraire et existentielle. Le lecteur est entraîné dans un récit qui mêle confidences, errances et méditation politique, faisant de ce voyage un chant universel, à la fois brisé et porteur d’espérance.

4/ NATALIA : Devenir écrivain, Alexandre Lacroix, Editions Allary

Selon Natalia un livre simple et plein de grâces du directeur de la rédaction de l’excellente revue «  Philosophie magazine ».

Dans « Devenir écrivain », Alexandre Lacroix s’adresse à celles et ceux qui rêvent d’écriture. Loin d’un simple manuel technique, l’ouvrage raconte l’expérience intime de l’auteur, son rapport aux mots, ses lectures fondatrices et ses exercices pratiques. Il y dévoile les coulisses d’un métier souvent idéalisé, entre inspiration et rigueur, solitude et dialogue avec la tradition littéraire.

Lacroix fait de cet essai un compagnon de route, qui oscille entre encouragement et réflexion philosophique. Il rappelle que l’écriture est avant tout un acte de persévérance, de patience et de sincérité. On y trouve des clés pour avancer, mais surtout un souffle qui incite le lecteur à se lancer, avec la promesse que chaque voix mérite d’être entendue.

Il raconte comment on peut longtemps chercher son inspiration en piochant ici là, en s’inspirant des autres. Puis un jour il a compris qu’il fallait qu’il parle de ce qu’il avait au plus profond de lui et qui avait rapport à son père.

Natalia nous signale un interview-débat organisé par son association avec l’auteur le mardi 23 septembre à la Casa Bronzini .

5/ GENEVIEVE : Une longue route  pour m’unir au chant français , François Cheng, Albin Michel .

François Cheng, académicien et poète, livre avec « Une longue route pour m’unir au chant français » un récit autobiographique d’une rare intensité. Issu de la Chine troublée du XXe siècle, il raconte comment l’exil et la rencontre avec la langue française ont façonné sa vie et son œuvre. Le texte retrace ses découvertes artistiques, ses amitiés intellectuelles et son émerveillement devant une langue adoptée comme une patrie spirituelle.

Dans une prose lumineuse, Cheng dit sa gratitude envers la culture française, tout en témoignant de la richesse de l’échange entre Orient et Occident. Son itinéraire personnel devient un message universel sur la beauté du métissage culturel et la force poétique de la langue. Ce récit émouvant touche par sa sincérité et par la profondeur de son regard sur la transmission et l’espérance.

6/ BARBARA : Sucre noir, Miguel Bonnefoy, Rivages Poche

« Sucre noir » de Miguel Bonnefoy s’ouvre sur une légende de trésor englouti au large des Caraïbes. Le roman suit, sur plusieurs générations, la quête obsessionnelle de ce butin par des personnages aux destins intriqués : pirates, chercheurs d’or, héritiers de familles marquées par la légende. Chaque époque ravive la passion et les illusions liées à cette chasse éternelle.

Avec une langue baroque et foisonnante, Bonnefoy déploie une fresque où l’imaginaire caribéen, les croyances populaires et l’Histoire se mêlent. Derrière le mythe du trésor se dessine une méditation sur la vanité humaine et la mémoire des peuples. Le roman enchante autant qu’il questionne, dans une atmosphère proche du réalisme magique latino-américain.

Un roman flamboyant nous dit Barbara. Elle a d’ailleurs entrepris de lire tous les livres de Miguel Bonnefoy !

7/ CATHERINE : L’heure des prédateurs , Giulliano Da Empoli, Gallimard

Catherine a présenté le livre qui avait été exposé lors du précédent club littéraire. C’est intéressant d’avoir un autre point et un autre ressenti.

Elle n’a pas ménagé ses critiques à propos de ce livre qu’elle a trouvé écrit avec une relative paresse , sans réelle profondeur et  sans présenter de véritables analyses. Cela a entraîné un échange vif mais toujours bienveillant avec les participants qui avaient lu et aimé ce livre ( qui vient après le Mage du Kremlin)

Dans « L’heure des prédateurs », Giuliano Da Empoli dépeint le monde impitoyable des élites économiques et politiques contemporaines. Le récit, construit comme un thriller, dévoile les coulisses d’un univers où la séduction, la manipulation et le calcul remplacent toute forme d’idéal.

Les personnages, à la fois fascinants et inquiétants, incarnent les nouveaux maîtres du jeu globalisé.

Da Empoli, observateur avisé du pouvoir, propose un miroir glaçant de notre époque. À travers cette fiction, il interroge les ravages du cynisme, l’effacement des valeurs et la montée de figures capables de tout pour régner.

Le livre captive par son rythme et sa lucidité, tout en laissant le lecteur face à un constat inquiétant sauf Catherine qui était plutôt en colère contre l’auteur…..

8/ JACKY : La Bonne Mère, Mathilda Di Matteo, L’iconoclaste Roman

Jacky a fait un tabac en présentant le livre. Tellement que plusieurs exemplaires ont été vendus à la fin. A parier, tous les participants du club de lecture s’arrangeront pour lire ce livre et ont dit qu’ils l’offriront à Noël  !!

Mathilda Di Matteo nous entraîne à Marseille avec « La Bonne Mère ». Le roman s’ouvre sur une ville bigarrée, marquée par la violence sociale et les fractures générationnelles. Sous le regard de la basilique Notre-Dame de la Garde, plusieurs destins se croisent : des jeunes en quête d’avenir, des familles fragilisées, des personnages tiraillés entre espoir et fatalité.

Dans une langue nerveuse et empathique, l’auteure dresse un portrait sensible de Marseille. Elle évoque autant la dureté de la vie dans les cités que la solidarité qui peut s’y inventer. Un roman d’une grande humanité, où se mêlent rage, tendresse et quête de rédemption.

9/ MICHELE : Le crépuscule des hommes, Alfred de Montesquiou ; Robert Laffont.

Une lecture de l’histoire comme Michèle les aime, avec une pincée romancée pour mieux favoriser l’ingestion et la digestion de la lecture.
Le récit de ce procès (20 novembre 1945 -1er octobre 1946, exécution des pendaisons le 16 du même mois ) est raconté par le photographe Ray d’Addario, enrôlé par l’armée américaine qui a couvert tout le procès. Nous assistons avec lui aux préparatifs, aux différentes auditions, aux comportements des accusés, des juges, placés sous la juridiction du Tribunal militaire international.
Le choix de Nuremberg n’est pas anodin puisqu’elle a été la capitale symbolique du nazisme,
une  ville détruite à 90% où des survivantes faméliques font bouillir des pommes de terre sur un fourneau en tôles, où subsistent des poches de résistances, où des jeunes hitlériens tendent des câbles pour décapiter les passagers des jeeps américaines, où des tags apparaissent avec le chiffre “88”, répétition de la huitième lettre de l‘alphabet, le “H” pour “Heil Hitler”.
Le procès de Nuremberg  est intenté par les puissances alliées   contre 24 des principaux responsables du Troisème Reich .Quatre chefs d’accusation sont invoqués : complot, crimes contre la paix, crimes de guerre, et crimes contre l’humanité, ce dernier point étant une notion partiellement nouvelle. Il vise aussi à offrir une justice aux dizaines de millions de victimes , de tenter de dénazifier l’Allemagne « une thérapie collective ou l’histoire tente de reprendre son  souffle après des années d’horreur. ».

 Ce procès met aussi en évidences les futures « tensions » (euphémismes!!!) entre les parties prenantes :  « Les Américains sont ici parce qu’ils sont soucieux de justice,  les Soviétiques parce qu’ils sont avides de vengeance. » Un livre qui met en évidence  les polysémiques sur le mot Justice.

 Un très bon livre instructif et bien documenté qui résume ce que disait Albert Camus  de la Justice dans  Combat en 1944  » Une chaleur de l’âme » mais aussi » une terrible passion abstraite qui a mutilé tant d’hommes ».

Delphine a expliqué  ensuite brièvement  comment peut se  justifier la notion  «   crimes contre l’humanité ».

10/ MIGUEL :  Douce France, Karine Tuil, Le Livre de poche

Le livre magnifique de Karine TUIL «  La décision » avait été présenté  déjà par 2 fois dans le club littéraire.

Le livre commenté  ici est antérieur et signe la volonté de l’autrice de coller aux faits de société.

Karine Tuil frappe fort avec « Douce France », qui plonge au cœur d’un centre de rétention pour étrangers. Le roman raconte le quotidien de ceux qui y sont enfermés, confrontés à l’attente, à l’incertitude et à la brutalité administrative. À travers des personnages multiples, l’auteure met en scène l’exil, le déracinement et la question brûlante de l’accueil des migrants.

Dans le roman il y a une imposture puisque celle qui en est l’héroïne , par un concours de circonstances, s’est faite passer pour une étrangère sans papier pour connaître la réalité vécue par les migrants.

Avec une écriture vive et tendue, Tuil ne se contente pas de décrire : elle immerge le lecteur dans cette réalité oppressante. Son récit, miroir de nos débats contemporains, interpelle chacun sur la notion d’humanité et de solidarité. Un livre qui dérange autant qu’il éclaire, donnant voix à ceux que l’on préfère souvent oublier.

La fin est surprenante.

Les  premiers coups de cœur de nos libraires à l’occasion de la Rentrée Littéraire,  parmi une multitude d’éditions

JOSE a choisi :

11/ La récréation est finie, Dario Ferrari, Éditions du Sous-sol

« La récréation est finie » de Dario Ferrari raconte le passage brutal de l’utopie de jeunesse à la confrontation avec la réalité adulte. Des personnages attachants, nourris d’idéaux et de rêves, se heurtent au monde du travail et aux désillusions du quotidien.

À la fois drôle et amer, le roman dépeint une génération en perte de repères, oscillant entre nostalgie et résignation. Ferrari manie une ironie tendre, qui rend ses personnages profondément humains. Un récit qui parlera à quiconque a connu la fin d’un âge insouciant

12/ Le monde est fatigué , Joseph Incardona, Éditions Finitude

Joseph Incardona, dans « Le monde est fatigué », peint une société saturée de crises, où les individus cherchent tant bien que mal un sens. Ses personnages évoluent dans une atmosphère de lassitude, oscillant entre humour noir et désespoir lucide.

Avec un style incisif, l’auteur croque des figures fragiles mais tenaces. Il offre une fresque grinçante, qui rappelle que même dans l’épuisement, subsistent la tendresse et le rire. Un roman désabusé mais vital, où la fatigue devient paradoxalement une forme de résistance.

13/ Kolkhoze, Emmanuel Carrère, P.O.L.

Dans « Kolkhoze », Emmanuel Carrère revient sur l’histoire soviétique en mêlant récit romanesque et enquête personnelle. À travers le symbole du kolkhoze, il interroge l’idéologie collective et ses conséquences sur les vies individuelles. Ses personnages, pris dans la toile de l’Histoire, oscillent entre rêves brisés et survie.

Fidèle à son art de brouiller les frontières entre fiction et réalité, Carrère offre un texte dense et dérangeant. Le roman devient une réflexion sur le pouvoir, la mémoire et les héritages encore vivants d’un siècle idéologique. Une fresque intime et politique qui ne laisse pas indemne.

Certains membres du club de lecture ont parié que ce serait le prochain prix Goncourt

MARLIES a proposé :

14/ Ajisaï, Aki Shimazaki, Actes Sud,

Avec « Ajisaï », Aki Shimazaki poursuit sa fresque japonaise en s’attardant sur une famille marquée par les secrets. Les générations s’entrecroisent, les non-dits s’accumulent, et des révélations viennent fissurer l’équilibre fragile. L’« ajisaï », l’hortensia, devient une métaphore des émotions multiples qui colorent la vie.

Par une écriture limpide et délicate, l’auteure capte les nuances des relations humaines. Tout en sobriété, son roman fait ressentir une intensité rare, où chaque mot pèse. Un petit bijou de retenue et de profondeur.

15/ Nous sommes faits d’orage, Marie Charrel, Les Léonides.

Marie Charrel livre avec « Nous sommes faits d’orage » un roman vibrant sur les passions humaines. Ses personnages, confrontés à la douleur et aux élans du cœur, évoluent dans une atmosphère de tempête intérieure. L’orage, récurrent, incarne les forces qui bouleversent et transforment.

Dans une langue lyrique et incarnée, l’auteure fait de chaque destin une épopée intime. Les émotions s’expriment avec intensité, donnant au récit une résonance universelle. Un roman à la fois bouleversant et lumineux.

16/ Les bons voisins, Nina Allan, Tristam

Nina Allan, avec « Les bons voisins », joue sur la frontière entre quotidien et étrangeté. L’histoire, centrée sur des relations de voisinage, explore les solidarités précaires et les inquiétudes sourdes qui traversent une communauté.

Entre chronique sociale et récit aux accents fantastiques, Allan tisse une intrigue troublante. Elle dévoile les fissures sous la banalité apparente et transforme le quotidien en énigme. Un roman qui séduit par son atmosphère singulière et son art de brouiller les certitudes.

Faites connaître autour de vous ces soirées où l’on aime parler des livres !Partagez les comptes rendus !

Visites tunisiennes à Lourmarin

Nous avons eu le plaisir d’accueillir nos amis de Tunisie. Dans le cadre de leur visite, nous leur avons proposé « une échappée belle à Lourmarin » comme ils le mentionnent si bien.

Retrouvez l’article en ligne sur lapresse.tn en cliquant sur le lien suivant : https://lapresse.tn/2025/07/01/nous-avons-visite-pour-vous-lechappee-belle-a-lourmarin/

La Presse — En groupe, nous nous sommes empressés de répondre à cette invitation au voyage. Par une journée d’été ensoleillée et à 36°, un soleil méditerranéen irradie vignobles, clairières et arbres ombragés. L’itinérance routière prend aussitôt des airs d’échappée dominicale. Notre route empruntée serpente des étendues de champs et des montagnes à perte de vue, nous donnant un avant-goût de l’esprit de villégiature qui règne dans ce joyau pittoresque du sud de la France, à 30 mn en voiture d’Aix en Provence et à 1 heure d’Avignon. 

Des vignobles, certes, mais aussi des vignes, amandiers, ou oliveraies à couper le souffle bercent les 1.200 villageois vivant sur place, nichés au creux de la vallée du Luberon, au Vaucluse. Lourmarin est pittoresque à souhait : elle happe ses visiteurs par ses bâtiments historiques et sa faune et sa flore qui réjouiront les plus ornithologues d’entre nous.   

Rendez–vous à l’ombre à 11h00 tapantes pour une visite passionnante, assurée par deux spécialistes du village, Florian Bouscarle, professeur des écoles, originaire de la région, accompagné de Michèle Stubbe Robinet. Le duo est connaisseur de l’histoire du Lourmarin et spécialiste d’Albert Camus.

A travers leur travail associatif charnu, ils se sont consacrés à l’œuvre de ce pilier de la littérature française moderne en organisant de nombreuses conférences et événements littéraires tout public, autour de l’œuvre et la vie camusienne sur place, mais aussi dans d’autres régions. De nos jours, ils s’ouvrent davantage sur d’autres formats et activités littéraires et culturelles. Michèle et Florian ont organisé une conférence à succès autour de la vie d’Albert Camus, à Hammamet en 2022. 

Les retrouvailles se font au pied du «Château Renaissance», restauré depuis les années 20 et qui accueille toute sorte de concerts et d’événements musicaux depuis des décennies. L’édifice existe depuis 1480. Son restaurateur est Robert Laurent–Vibert. Le lieu accueille aussi résidences artistiques et expositions.

Son jardin surplombe le village, un petit paradis qui accueille insectes, oiseaux et poissons d’eau douce qui cohabitent en harmonie. Lourmarin est un village à moitié catholique et à moitié protestant. L’ancien donjon du premier château médiéval est visible de loin, tout comme la cloche qui sonne chaque heure et rappelle cet aspect spirituel et paisible. Au loin, un édifice fait office de temple protestant. L’architecture puise dans son époque médiévale. L’édifice a été bâti sous le règne de Napoléon Bonaparte sur des années. 

Le village s’envole tel un colimaçon construit comme une coquille d’escargot et tient son nom du latin qui signifie «lieu marécageux», «nom légionnaire», ou plus probable «forêt marécageuse». Lourmarin tient son éclat grâce aux maires qui ont su la préserver en l’aménageant et en luttant contre les constructions anarchiques.

Plusieurs fontaines historiques jalonnent le village et sont classés monuments historiques depuis 1914. Le site a vu passer diverses civilisations dont les Maures ou Sarrazins et possède son histoire néolithique, qui est attestée.

Lourmarin possède son centre-village jalonné de petits commerces et de cafés et restaurants gastronomiques. «Chez Gaby» offre salades fraîches et autres plats méditerranéens succulents. Lourmarin vit au rythme des touristes qui la traversent, spécialement en plein été. Ils peuvent ainsi profiter des marchés provençaux et leurs nombreux stands, et des marchés, avec leurs producteurs locaux d’huile d’olive, de miel, tomates, gibassié… et l’agriculture locale spécialisée davantage dans les vignobles des Côtes‑du‑Luberon (AOC) ou les cultures fruitières des cerises, amandes et huile d’olive.

Artisanerie, culture, nature, faune, flore, gastronomie fusionnent harmonieusement dans cet écrin, situé entre montagnes, terres à perte de vue et forêts. Une destination qui a fait rêver intellectuels et écrivains et qui bouleverse toujours autant ses visiteurs. Albert Camus a écrit «Le premier homme» à Lourmarin avant d’y être inhumé.

Par Haithem HAOUEL